Yakuza ou The Yakuza en V.O est un film américain de Sidney Pollack sorti en 1975.
Un scénariste qui fait ces premiers pas
En lisant le nom de Paul Schrader, ma génération, et moi-même je l’avoue aisément ne pensons aux premiers abords qu’a une chose : Dominion : The Prequel of The Exorcist.
Ce film, sorte de relecture surprenante de la mythologie introduite au cinéma par William Friedkin en 1973, surpris tellement les studios, que fait unique, un autre film, réalisé par Renny Harlin cette fois-ci fut commandé. Condamnant le film de Schrader à une diffusion en festival. Enfin, c’est sans compter sur l’échec total du film de Harlin, qui changea quelque peu la donne pour Dominion… Mais ça c’est une autre histoire !

Mais outre une carrière de réalisateur peuplée de quelques films qui résonnent dans l’histoire du cinéma (le remake de La Féline, Mishima, American Gigolo…) C’est le scénariste qui nous intéresse aujourd’hui.
Le nom de Schrader est associé au scénario de bon nombre de métrage aujourd’hui culte tel que Taxi Driver, Mosquito Coast ou encore Raging Bull. Mais avant tout cela il y’a une histoire celle de Yakuza….
Un scénario à 325 000 $
Schrader inconnu à Hollywood et son frère Leonard (responsable plus tard de l’histoire du film Le Baisé de la femme Araignée), vendent leur script au tarif record de 325 000 dollars au studio Warner Bros.
C’est cette vente qui fit rentrer le scénariste sur le marché hollywoodien et lui permit d’écrire le mythique Taxi Driver pour Martin Scorsese.

Au départ le studio choisit comme réalisateur Robert Aldrich et comme acteur principal Robert Mitchum. Mais ce dernier qui avait déjà travaillé avec Aldrich sur Trahison à Athènes, choisi lui-même le metteur en scène. Ce sera Sidney Pollack, qui fit réécrire le script des frères Schrader par Robert Towne, auteur du génial Chinatown pour Polanski.
Qu’est que sa raconte ?
20 ans. 20 ans c’est le nombre d’année qui se sont écoulé depuis que l’ancien policier Harry Palmer est parti du Japon. Mais aujourd’hui pour venir en aide à son ami George Tanner et sa fille enlevée par des Yakusas du clan Toshiro. Il doit se résoudre à revenir au pays du soleil levant. Mais le Japon, Palmer ne l’a pas quitté de gaieté de cœur.
Membre de la police militaire pendant l’occupation US au Japon, il tomba en effet amoureux d’une jeune femme du nom d’Eiko, qu’il devra ensuite quitter, puisque cette dernière refusera de l’épouser.

Pour aider son ami, Palmer reprends contact avec son ancienne petite amie et même si les retrouvailles ne se font pas dans la joie, lui demande de le mettre en contact avec son frère, Ken Tanaka, un ancien Yakusa qui connait tous les rouages du syndicat du crime japonais.
Mais en sauvant la fille de Tanner, Tanaka et Palmer tuent deux membres du clan Toshiro. La guerre est donc déclarée…..
Pourquoi j’ai voulu voir ce film ?
Oui j’avoue l’histoire est complexe, et difficilement résumable en si peu de temps. Mais le film de Pollack, même si il fut quelque peu oublié des cinéphiles, servi d’inspiration à de grand cinéaste.
Le Black Rain de Ridley Scott avec le même Ken Takakura ou encore le célèbre Kill Bill de Quentin Tarantino ne sont que des exemples.
Les premières minutes ?
Pour nous introduire à se monde, si éloigné des mœurs occidental, Pollack fait un choix d’abord musical.
Il introduit la partition aux sonorités orientales et envoûtante de Dave Grussin, le tout sur un texte, défilant sur un fond limite psychédélique, évoquant l’histoire et la philosophie des Yakusa.

S’ensuit un scène quelque peu sortie de nulle part, celle d’un entretien entre un Yakusa et un informateur neutre. Cette scène est au final bien plus que l’exposition du scénario, le cinéaste est ici précis et réaliste comme durant la suite de son métrage. Les codes et les coutumes des Yakuza sont ici respectées à la lettre (le salut, les japonais qui prédomine sur l’anglais …).
Cette scène qui a le mérite d’être captivante, dans le premier sens du terme, se veut à l’image du métrage. On est immédiatement happé par le rythme, l’histoire et bientôt les personnages de cette intrigue.
Le casting ?
Le casting du film se limite à deux noms tant les deux acteurs principaux que tout opposent porte à eux seuls le film, sa trame et surtout sa symbolique.
D’un côté Robert Mitchum super star de l’époque dans son pays , habitué au western et au film noir. Il joue ici un rôle à contre emploie où il ose énormément. A l’image de la scène qui sera paradoxalement moquée lors de la sortie du film, où Tanner se coupe un doigt en signe de pardon et de soumission à son ami Tanaka. Les critiques voyant ici l’image d’un Mitchum vieillissant et devenu obsolète.
De l’autre Ken Takakura, méga star au Japon. Et indissociable de son image noble de Yakusa. Loin encore de sa réputation de « Clint Eastwood japonais », le public Nippon venait de le découvrir en Golgo 13 dans le premier film adaptant le célèbre manga de Takao Saito et bientôt allait pouvoir le découvrir en terroriste, avec des motivations plus profonde qu’en apparence dans le Super Express 109, qui fut la principale inspiration du Speed de Jan de Bont, Takakura est ici tout en retenu face a son homologue américain. Et sa présence quasi mystique par moment, tant son personnage est plus évoqué que présent à l’écran, rend paradoxalement sa présence forte et importante.

Et au final ça donne quoi ?
Ultra froid et réaliste, l’ambiance du métrage est encore plus renforcée dans ce sens par l’ajout volontaire par Pollack de techniciens et d’acteurs nippon. La présence de Ken Takakura incarnation du yakuza dans les films de la Toei, est un monstrueux pied de nez aux studios hollywoodien voyant à l’époque très mal ce mélange des genres. Il apporte à lui seul le réalisme au métrage et fait rare il est constamment à égalité avec son homologue américain, Mitchum…
Oui, Mitchum le monstre sacré du western est là aussi. Et de manière surprenante il réussit à transcender ce rôle loin de ses repères habituels ou de l’image qu’on de lui peut être.

Mélanger les codes du polar américain à ceux des films de gangsters japonais. Il fallait l’oser. Et le scénariste Paul Schrader et son frère réussissent avec brio cet étonnant mix des genres, qui à l’image de la culture US au Japon n’est jamais tout à fait uni. En résulte un film hybride et surprenant tantôt polar, tantôt film de gangster, mais toujours entre deux.
Évocation brillante de la période du « miracle japonais », Yakuza reviens sans détour sur la crise identitaire profonde du pays, la monté de la pègre et les évolutions sociales majeur connu par la société nippon au tournant des années 70.
Échec au box-office à sa sortie, film maudit et méconnu pour son cinéaste avant de devenir une référence et une influence inattendu pour bon nombre de réalisateur. Yakuza est une œuvre singulière et éphémère, à savourer plutôt que dévorer dira-t-on.
Voilà, Yakuza c’est sa et bien d’autre chose et il faudrait des heures pour être complet à son sujet. Alors bon visionnage !

Yann R.
Cliquer sur la miniature pour retrouver l’émission consacré au film sur CinéMaRadio, avec des extraits tirés du film et de la bande originale.
Source :